Editorial Toc Toc Toc 8
mercredi 3 mai 2006

Que d’œuvres... des œuvres sublimes, des œuvres provocantes, des œuvres visionnaires, révolutionnaires. Que d’écrits sur ces œuvres.... L’Art se meurt ? Et puis ... après 30.000 mille ans pourrait-il disparaître ? La peinture est morte, et puis...le marché de l’Art se porte bien.... Il suffit de voir les derniers grands collectionneurs « les mégalo-collectionneurs » qui font et défont la cote des artistes qu’ils privilégient..... Des masses en mouvement, des couleurs, des textures, lumières, lignes, figures géométriques, des silences, des absences, du baroque, du minimal, du Land Art, de l’éphémère, des visions, des disparitions, des mutations, des incantations, des énigmes.... Chaque voyage autour d’une œuvre nous demande du talent, de la mémoire, de la force. Voyage dans le sensible du créateur, de l’inventeur, du chercheur, l’autre, celui qui n’a pas peur de donner encore et encore, celui qui crée, celui qui reste enfermé pour créer, celui que l’ on enferme, celui qui a la grâce et peut créer, ou réfléchir, ou écrire sur des œuvres, celles qui nous donnent l’illusion d’être maître de notre destin et de la beauté. Que de signes, que d’idées, de découvertes, d’illuminations qui forcent l’univers à avoir un sens.

Dans notre numéro 8 nous parlerons de certains des ces artistes, de leurs écrits, ceux qui plongent dans l’œuvre de l’autre. Dans la Rubrique Philosophes des Lumières Diderot analyse l’œuvre de Chardin, un peintre unique, au-delà de son temps, son œuvre nous remue encore, et les écrits de Diderot nous bouleversent encore par leur acuité.

Rubrique Culture : Fernando Arrabal nous fait ses confidences, il scrute ses pensées, le souvenir de ses premières années d’exil, nous décrit la fine trame de ses propres constructions philosophiques. Panique nous montre son nez... Denys Condé cherche une vérité ou une réponse, fait le bilan des dernières années du monde de L’Art, ce tapage démesuré, étalage accepté, rempli de fantasmagories les plus grotesques. Philippe Pujas dans son texte sur l’Art Subminimal, nous entraîne dans l’absurde, sans quitter pour autant la réalité. Rubrique photographie, Saura le peintre, explore dans une longue analyse l’œuvre photographique de Joël- Peter Witkin, ses sujets équivoques, la jouissance de l’obscène, les causes psychologiques. Recherche très aiguisée sur un artiste très discuté.

Rubrique Livres, Jean-Louis Schefer nous restitue un Chardin jouant de sa peinture, énigmatique, ses choix de couleurs, textures, et la maîtrise de cette lumière éternelle et diffuse.... Ces personnages et portraits retenus dans une atmosphère immuable, et concrète. Claude Pujade-Renaud déploie un labyrinthique récit autour d’un Platon malade, malade avant sa mort et d’un Socrate si vivant, perturbé, éperdu ; l’écrivain nous mène par monts, vallées et grottes dans ce monde antique où on mourait pour des convictions philosophiques. Marguerite Yourcenar aiguise son sabre, elle nous emmène vers le parcours littéraire et philosophique par lequel Mishima périra, aventure d’une vie, d’un écrivain et d’un homme touchant le néant et la courbe fatale de notre monde actuel... Mishima vu par Marguerite Yourcenar l’écrivain le plus approprié pour brandir cette arme de beauté et de destruction. Marie-Claire D’Andreis, écrivain amateur, découvre une révolutionnaire sud-américaine, pendant l’odyssée de l’indépendance, menée par le grand héros national, Simon Bolívar et sa compagne, Manuela Saenz, colonel de toutes les troupes, une « passionnaria », flamboyante, immolant sa force et sa vie pour cette cause.

Rubrique poésie, Julia Kristeva nous montre, dans son travail presque scientifique, que les transgressions sont des preuves du dépassement amoureux envers une œuvre, elle fait éclater notre poète, Baudelaire, ni dandy, ni poète maudit....... elle dissèque l’homme et son esprit abyssal. Encore des œuvres, mais cette fois, nous remontons le temps de l’Histoire. Les noms des artistes ,maintenant très célèbres et reconnus, que nous avions découvert à la Galerie Stadler, à cette époque nous étions encore aux Beaux Arts de Paris, le choc reçu, nous voudrions dans le parcours de la revue Toc Toc toc, vous le faire ressentir, tel quel où même dans le désordre. Et nous partîmes retrouver M. Rodolphe Stadler, la source de 44 ans de galerie.

Donc Rubrique Réflexions d’Artiste accueille trois concepts différents sur les œuvres de trois peintres, les plus originaux de notre siècle : Antonio Saura, Arnulf Rainer, et Roberto Matta. Marcel Cohen dans une formidable mosaïque nous restitue le peintre Saura, ses pertes, ses renoncements, son énergie, la partie d’ombre. Cette recréation fusionne avec des particules aspirantes où voltigent le cerveau et l’esprit en feu d’un Saura lumineux. Matta ou l’Eloge de la peinture : Fardoulis-Lagrange suit pas à pas les aléas d’une œuvre en gestation, le peintre cherche, choisit, gesticule, s’acharne, nébuleuses qui deviennent signes, des matières, du chaos gluant qui se métamorphosent en bestiaire. Les formes se soulèvent peu à peu sous les coups de couteaux du peintre, forçant et dessinant ainsi des apparitions martelées, lunaires, transparentes.... Nous serons captivés par la personnalité riche, fulgurante du peintre Arnulf Rainer, présent depuis le début a la galerie Stadler qui a pu être approché par Marcel Cohen, qui plongeant dans le monde du peintre, l’abîme.... Nous fait toucher cet ange noir de la peinture, son dilemme entre l’invisible et le trop visible, raturant, recouvrant forçant la matière, a lui rendre le secret de son sujet. Michel Cassé ses réflexion sur « La grande Œuvre », l’œuvre unique, l’univers, ses complexités, ses matières, ses mystères. Chaque jour nous devrions en prendre conscience, l’entrevoir, le voir, le percevoir. « c’est la matière qui pense » nous dit il, notre « astronome de l’invisible » déroule ses connaissances amoureusement, et nous donne plus que le vertige. Il nous entoure du halo de l’espoir.

Rubrique Art Installation, rigoureux, dossier descriptif sur une recherche visuelle, musicale, architecturale, d’une grande vision plastique et poétique. Rubrique texte contemporain : Martial Jalabert Avec la force de son énergie linguistique, pour nous faire part de ses pensées.

Rubrique Art Actuel : deux artistes, jeunes, qui imposent actuellement leurs œuvres d’une rare qualité spirituelle pour Alexandra Roussopoulos et Martin Mc Nulty à la poursuite des matières de rien pour une alchimie de nos déchets.

Rubrique Ecriture Internaute : La Luciole Electrique, lucide nous transmet ses réflexions sur la possible disparition de la photographie argentique, l’avalanche des transformations économiques qui pèsent sur cet art attaqué de plein fouet, il nous laissaient craindre le pire.

Rubrique Théâtre : Il s’agit plutôt de la résistance, et avec le texte de Melville, une pièce de théâtre « Bartleby » au Théâtre de la Commune, une mise en scène de David Géry rigoureuse, structurée autour d’un être humain qui dans nos sociétés est relégué et ne retrouvera jamais sa place, « il y a quelqu’un de moral dans la salle ? »Jamais autant d’absurdité, de poétique, et d’inattendu, nous avait fait frôler la vérité.

Rubrique Extases : comme une gorgone les tissus se déchirent, les chairs s’ouvrent, Hélène Cixous. Le texte se dévore lui- même. IL prolonge son agonie en s’expulsant. Malgré ou précisément par la lourde liste de toutes ses matières, quelque chose s’envole...A l’origine était le verbe. C’est sans doute lui qui nous emporte vers ses rivages. Magnifique chorégraphie de l’élévation, mais sans doute, le gouffre nous attend.

Rubrique l’Exutoire : avec Lao-tseu une forteresse se soulève dans un paysage aérien, la pensée, le texte et la sagesse. Et bien sûr la rubrique Rock de Michel « Screaming » Espag , les frap-dingues du rock’n roll. d’hier et d’aujourd’hui., merci Mister Screaming Jay Hawking, que la folie du Rock nous préserve.

C’est ainsi que toc toc toc 8 faisant feu de tout bois, nous fait découvrir, réfléchir.

Longue aventure sur les écrits et les œuvres qui s’entrechoquent et se bousculent.

Bonne lecture.