JOE DOWNING a la GALERIE PASCAL LAINE
vendredi 1er septembre 2017
par Administrateur- tiphaine
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Joe Downing est l’un des plus authentiques représentants de l’abstraction « libre » d’après-guerre. A travers un fourmillement de formes, devenues de plus en plus lumineuses avec le temps, il développe une poétique très personnelle de l’espace, du rythme et de la couleur. L’artiste nous communique son « émerveillement » par des toiles, des agrafages, mais aussi des peintures sur cuir clouté, sur châssis de fenêtres récupérés ou sur de vieilles portes de grange. A croire qu’il n’y aurait pas chez lui de frontières bien marquées entre le quotidien le plus banal et l’imaginaire pictural. En fait pour Joe Downing, seul le regard peut se désenchanter, le monde, lui, continue à vibrer : ailes de papillons, feuilles de platanes, lézardes de murs, tout vibre, tout vit. Il faut réapprendre à voir et à écouter. Textes pour l’hommage rendu à Joe Downing - Ménerbes 2008

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A Ménerbes, le fond de mon atelier est le rocher à nu, mon chevalet se dresse entre trois fenêtres. Je vois les tuiles d’un toit, tachetées de lichen gris et jaune, attentives au soleil comme des oeufs de dinosaure. Ensemble et à tour de rôle, un rosier grimpant, une fleur de la passion, une glycine, un buisson ardent fleurissent, bougent, exhalent leurs parfums, absorbent et renvoient lumière de soleil et lumière de lune. Derrière, au loin, la ligne ondulante du Luberon barrant le ciel. Ciel, montagne, acacia tricentenaire, jardin sauvage ; fenêtre, chevalet, toile pinceau. Là, quotidiennement, en toute quiètude, les tableaux avancent, mêlés eux aussi comme les vignes, les fleurs, les maisons, les rues, séparés et unis. Il y a le plus silencieux des bruits, soies de pinceau sur surface de lin. Dehors, dans la chaleur, l’herbe pousse, ses graines tombent. Un chien aboie. Joe Downing (extrait de l’édition lithographique d’estampes intitulé " A Ménerbes " , Editions Galerie Pascal Lainé - Avignon 2005)

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A l’occasion de la sotie de l’album « A Ménerbes », qui rassemble sept poèmes et huit lithographies du peintre Joe Downing, le galeriste Pascal Lainé présente quelques-unes des dernières œuvres de l’artiste américain.

On le sait, Joe Downing a élu domicile en Provence, à Ménerbes, à la fin des années 60. Au creux d’une ruine, il s’est crée une maison qui a tout de la caverne d’Ali Baba, peuplée d’objets insolites et beaux, glanés au hasard des trouvailles et des rencontres. C’est sans doute la conjonction de ce lieu très fort, qui lui est comme un repère et du paysage alentour, avec ses ombres et ses lumières, la pureté de son ciel, qui a nourri l’art de Joe Downing. Son installation dans l’éblouissement de la nature provençale a modifié sa peinture et changé son existence. Et c’est un hymne à cet évènement que le peintre a voulu chanter en associant lithographies et textes.

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Ce recueil a été composé à partir d’une série d’aquarelles peintes au fil des ans. L’idée d’un album de lithographies est venue au galeriste Pascal Lainé il y a plusieurs années. Il souhaitait que le travail soit réalisé par les ateliers Pons. En effet, ce graveur qui a travaillé avec Hartung, Poliakoff, Deyrolleet beaucoup d’autres grands noms de l’école de Paris, est un des derniers à utiliser la pierre de Munich dont les carrières sont aujourd’hui épuisées. Cette méthode traditionnelle exige entre sept et neuf passages d’encres différentes pour chaque lithographie et confère aux œuvres une qualité exceptionnelle. Mais c’est surtout la connaissance du métier et une « Sensualité de l’image immense » comme le dit Joe Downing, qui font de ce graveur un maître. « Il en est sorti quelque chose que je n’avais jamais vu sortir ni de mon travail, ni tu travail de quiconque » ajoute celui-ci.

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L’idée d’adjoindre des textes aux lithos est venue de l’artiste sans qu’il sache vraiment expliquer pourquoi. La langue maternelle de Joe Downing est l’américain, mais il s’exprime dans un français d’une incroyable justesse et d’un merveilleux raffinement. C’est avec un soin extrême qu’il choisit ses mots, usant avec subtilité et finesse d’expressions qu’il aime imagées, colorées et de préférence teintées d’humour. Bref, le français de Joe Downing est un pur régal et on l’écouterait parler des heures. De ses poèmes, qu’il a écrits récemment, il dit : « J’en avais deux ou trois en tête depuis longtemps. Et quand j’y ai repensé je me suis aperçu qu’ils étaient prêts à sortir, comme s’ils avaient attendu ». C’est un chant à Ménerbes et à ses habitants, un chant aux pierres et aux arbres, aux souvenirs d’instants anodins, de jours précieux et lumineux, que le peintre élève. C’est une sorte d’offrande qu’il présente, un cadeau, tout simplement.

Isabelle Scheibli, L’Hebdo Vaucluse 16 décembre 2005

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