Textes comptemporains
Ekat
jeudi 18 janvier 2007

Je me suis rapprochée aujourd’hui de la fenêtre, le soleil est fort ; je vois sur ma feuille des nuées, vapeurs chaudes se déplacer. Il y a de la répétition générale dans l’air. Ma cour, mon étrange fosse d’orchestre...

J’entends rassurant le doux bruit de la climatisation qui ronronne et tourbillonne. C’est vrai qu’il était grippé ces derniers jours ou plutôt en colère : il s’essayait à de nouvelles vocalises , très osées, surtout la nuit. On l’a calmé comme on calme l’esprit créatif et rebelle.

Une houlette invisible a eu raison de son escapade sonore.

Tant pis pour mon concerto.

Hier, au troisième, trois japonais en sous vêtements blancs jouaient avec des pions. A quel jeu ? Un des nombreux tableaux furtifs dispensés par le mur des voyageurs...

Les deux pigeons qui vivent au cinquième coincés entre le gros tuyau et le caisson métallique de la climatisation sont aujourd’hui en plein bécotage sur la fenêtre aveugle de la cage d’escalier latérale. (Oui, je sais, cela s’appelle de l’espionnage !) Un brin de sérénade. Et hop derrière le gros tuyau, choses plus sérieuses, bruissement d’ailes énergiques !

impossible de dire si les bruits qu’elle me renvoie s’échappent de ses mille et un pores ou si venus du dehors elle les digère . les feutre , les brasse pour une symphonie composite qu’elle seule, par ses propres limites pouvait créer.

La Verticale des employés constitue la trame vivante et régulière ponctuée par les pauses riches de fous rire et de bavardages.

L’un des stores gris des chambres s’ouvre et se ferme, des mains s’agitent sur la surface qui fait des vagues et grésille, une harpiste aux mains d’africaine fait le ménage dans les interstices...

Jamais je n’ai entendu concert si délicat. c’est a présent des coups battants puis une grille faite de mille clochettes qui tintinnabulent.

Puis cliquetis du contrepoids , chuchotements et rires étouffés de la Verticale

Abrasif et scie exaspérante dans la rue.

Une ruche à mon échelle....

Une cour aveugle, muette, pleine de voyeurs potentiels pourtant bourdonnante, bruissante, habitée par un cyclone dense qui lui appartient.

Frôlement de rideaux, climatisation de l’hôtel, batterie de cuisine, batterie de rock ou d’opéra se cogne sur les murs crème et s’ envole vrillant rejoindre la rue prolixe. Exercer sa délicatesse, choisir ses parfums, ses mots, ses images

Une voix de soprano chante Mozart et fait écho à ma voix qui ne dit rien une double interprète. Chante Mozart, chante mon silence Cette cour encore, cour de personne, de voyageurs, posée là comme un grand paquebot avec ses tuyaux, ses ronflements ses ronronnements, une immense machinerie

Une cour ouverte sur......

Son ciel bleu atlantique.

Sa verticale d’employées polonaises.

Je m’y sens bien ; je voyage le nez à ma fenêtre.

C’est une cour nuptiale avec des fenêtres de pauvres que l’on n’ouvre pas, un patio du néant.

Une centrifugeuse et son battement de cœur.

Le contre poids bandé de l’ascenseur qui touche le huitième ciel celui de la terrasse inaccessible aux non-résidents.

En route sur quel cap ?

Comme si je n’étais pas là par hasard...